Après la victoire contre Daech, la Cour suprême d’Irak s’oppose à un report des élections

Le Conseil des représentants, chambre basse du parlement irakien, a définitivement confirmé la tenue d’élections parlementaires et provinciales le 12 mai prochain, après deux mois de débats sur un éventuel report en décembre 2018 [article de presse – en anglais]. Réclamée avec force par les représentants sunnites et kurdes pour permettre au préalable la réinstallation de centaines de milliers de déplacés de guerre suite à la victoire proclamée contre Daech [article de presse – en anglais], cette option a été jugée inconstitutionnelle par la Cour suprême fédérale dans une décision interprétative du 21 janvier, quelques heures à peine après sa saisine pour arbitrage par les parlementaires [article de presse – en anglais].

Les communautés sunnite et kurde craignent que la courte période électorale ainsi décidée ne conduise à un grave déficit de représentativité des futurs élus. Environ 1,6 millions d’irakiens sunnites, sur un total de 2,6 millions de déplacés dans l’ensemble du pays, se trouveraient en effet dans l’impossibilité de régulariser leur situation à temps [article de presse – en anglais]. Le représentant Ahmed al-Jubouri, observant que moins de 2 % des électeurs de sa province de Ninive avaient pu s’inscrire sur les listes électorales en vue des prochains scrutins, a supputé que ce chiffre pourrait ne pas dépasser les 15 % d’ici le 12 mai [article de presse – en anglais]. Ici aussi, les principaux perdants seraient les populations arabes sunnites, très largement majoritaires dans cette province.

Le premier ministre Haider al-Abadi, de confession chiite et désireux de transformer en une confortable majorité parlementaire une popularité acquise au gré des succès de l’armée irakienne sur Daech, a pu compter dans ce débat politico-juridique sur le soutien de l’ambassade américaine de Bagdad [article de presse – en anglais]. Cette dernière a en effet affirmé que « repousser les élections créerait un dangereux précédent, sapant la Constitution et compromettant à long terme le développement de la démocratie irakienne ».

Après un nouvel échec des négociations au parlement faute d’avoir réuni le quorum requis lors des séances solennelles, la Cour suprême a finalement été consultée sur les implications de l’article 56 de la Constitution du 15 octobre 2005. Celui-ci fixe à quatre ans la durée du mandat du Conseil des représentants et à quarante-cinq jours avant expiration la date d’élection de la mandature suivante [traduction universitaire – en français]. Les juges, rappelant que la « loi suprême » garde force obligatoire « dans toutes les régions [du pays], sans aucune exception », en ont déduit que toutes les échéances électorales, aussi bien nationales que locales, doivent nécessairement se tenir dans les délais prévus par elle [article de presse – en anglais]. Les précédentes élections législatives irakiennes avaient eu lieu le 30 avril 2014. Celles de mai prochain seront donc les quatrièmes depuis la chute de Saddam Hussein [article de presse – en anglais].

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